Entretien avec la DG Weleda UK

Jayn Sterland (JS) : Weleda renouvelle actuellement sa certification B Corp (B Corp est le moyen d’engager une marque à améliorer continuellement sa position en termes d’exigences sociétales et environnementales) et ce processus déterminera notre orientation au cours des deux prochaines années, puisque notre objectif est d’accroître notre niveau d’exigence chaque année. Une partie de cet objectif consiste à augmenter la superficie des terres que nous cultivons de manière régénérative, à la fois par nous-mêmes et par l'intermédiaire de nos partenaires agricoles à long terme, tels que Sekem en Égypte, qui revendique le désert et le convertit en terres agricoles productives.

Weleda participe activement à la coalition B Corp beauty (B Beauty), qui a pour but de sensibiliser le public, d'élever les standards et d'ouvrir l'expertise au sein de l'industrie de la beauté durable. Cette initiative a été fondée par un petit groupe d'entreprises B Corp bien connues et je suis ravie de dire que nous avons plus de 60 entreprises de beauté durable accréditées par B Corp qui travaillent aujourd'hui ensemble.

JS : Dans le cadre de Futurum, Weleda s'est fixé pour objectif de faire en sorte que tous ses emballages ne soient pas nocifs d'ici à 2030, et nous sommes sur la bonne voie. Nous avons abandonné le verre bleu et transparent au profit du verre vert recyclé (ce qui est plus durable).

Nous abandonnons les tubes en plastique fabriqués à partir de matériaux recyclés après consommation au profit de pots en verre qui seront utilisés pour nos gammes visage. Nous avons travaillé avec nos fournisseurs pour mettre au point un tube en aluminium recyclé et nous l'utiliserons pour changer les packagings de notre gamme iconique Skin Food au cours des 12 prochains mois.

Nous modernisons les emballages de la gamme Bébé Weleda : nous améliorons nos flacons en plastique recyclable pour nos produits de Soins pour bébés afin qu'ils soient plus légers et entièrement fabriqués en rPET, et nous avons amélioré l'information des consommateurs sur les matériaux d'emballage directement sur le pack des produits. Nous testons également de nouvelles méthodes de distribution innovantes, telles que les emballages traçables et réutilisables.
 

JS : Tout comme nous avons vu des marques adopter des allégations “naturelles” ou “biologiques” douteuses, nous constatons le même phénomène avec le greenwashing et ses revendications environnementales.

Personnellement, je ne pense pas que des termes tels que "sans plastique", "neutre en carbone", ou "plastiques récupérés ou provenant dans la mer", etc. soient utiles. Aucune entreprise cosmétique ne peut encore affirmer avoir un impact positif sur la planète, car nous faisons tous partie d'un système non durable. Qu'il s'agisse des ingrédients et de l'eau que nous utilisons, des emballages que nous utilisons, des problèmes mondiaux de recyclage, de l’impact de l'argent que nous générons, de l'empreinte carbone générée par l'utilisation des produits, de l'empreinte des transports à l’international, etc.

Notre industrie est un système extrêmement complexe et toute tentative d'une marque de revendiquer une position de leader en matière de durabilité au sein de ce système est franchement malhonnête, dans le meilleur des cas. Il reste encore beaucoup de travail à faire.

JS : Il y a de plus en plus de preuves scientifiques que l'utilisation de certains microplastiques (pas les microbilles solides, mais les polymères synthétiques semi-solides et liquides) dans les produits cosmétiques a des conséquences importantes et néfastes sur la santé.

Un certain nombre de grandes marques européennes, dont Weleda, ont soutenu une lettre ouverte demandant l'interdiction de ces microplastiques dans la formulation des produits. On estime que cette lettre a eu un impact significatif en démontrant aux institutions de l'UE que les marques progressistes travaillent activement à un avenir sans microplastiques.

Le 26 avril 2023, le comité REACH de la Commission européenne a voté en faveur de la restriction des microplastiques ajoutés intentionnellement, cependant avec de longues périodes de transitions - par exemple, les délais dans certains secteurs comme le marché des colorants cosmétiques peuvent aller jusqu'à 12 ans. Peu de temps après, le « Plastic Health » symposium a été organisé au Parlement européen à Bruxelles le 2 mai 2023, à partir duquel une revue internationale sur "le plastique et la santé humaine" a été créée, avec 10 recommandations politiques à prendre en compte lors des négociations du Traité mondial sur les plastiques des Nations Unies et du Conseil de la santé plastique récemment lancé (qui a été créé par la « Plastic Soup Foundation » et « A Plastic Planet ») à la suite de cet événement.

Le Conseil de la Santé et du Plastique a été créé pour une mission : placer les impacts nocifs des plastiques et de leurs produits chimiques sur la santé humaine au cœur du Traité mondial sur les plastiques. Ce Conseil continuera à soutenir les principaux scientifiques de la santé qui se concentrent sur l'impact du plastique sur la santé humaine.
 

JS : Comme je l'ai dit, l'UE et le gouvernement britannique ont pris des mesures législatives pour contrôler les allégations de durabilité et d'écologie, ce qui est tout à fait nécessaire et doit être salué. Mais ce n'est pas suffisant. Nous avons une multitude de marques qui font du greenwashing, et une réputation dans notre secteur de ne pas dire la vérité dans notre marketing. Il faut que cela change et que le secteur commence à s'autoréguler par le biais d'un marketing honnête et d'une sensibilisation croissante des consommateurs. L'étape suivante doit consister à obtenir l'adhésion des distributeurs, détaillants, vendeurs sur internet, etc. en établissant des normes pour les ingrédients et les emballages tout en suivant les leaders du secteur tels que Whole Foods Market et Holland & Barrett.

JS : L'emballage en tant que "service" est un concept intéressant que de nombreuses grandes marques comme Weleda sont en train de tester - cela pourrait aboutir à la standardisation des types d'emballage que nous utilisons tous. Des débats font actuellement rage pour savoir ce qui est le plus durable entre les plantes cultivées en laboratoire, identiques à la nature, et les plantes cultivées selon des méthodes d'agriculture régénératrice, ce qui me semble être un débat très positif.

Au cours de l'année à venir, nous verrons un nombre croissant d'entreprises de beauté certifiées B Corp, y compris de très grands noms, ce qui ne peut être qu'une chose positive. La certification initiale B Corp est le point de départ et non le point d'arrivée. Enfin, à mesure que le bien-être occupera le devant de la scène, nous verrons de plus en plus de produits avec des allégations plus fortes et peut-être même des allégations de santé plus souples, car nous cherchons à différencier nos offres et à les rendre plus attrayantes.

JS : Au vu des dernières nouvelles concernant l'urgence climatique, il est facile de se laisser décourager. Cependant, au sein de notre industrie, de grandes initiatives sont en cours - du projet mondial qui étudie les allégations environnementales des produits sur les emballages, aux diverses coalitions qui se forment et qui mettent en commun leurs ressources et leurs connaissances, comme la Sustainable Beauty Coalition au Royaume-Uni.

Il est impératif que ces coalitions de "volontaires" gagnent du terrain et obtiennent des résultats rapides pour éviter la lassitude. Comme Shaun Russell, président de la B Corp B Beauty Coalition, aime à le dire, "si vous voulez aller vite, allez-y seul, si vous voulez aller loin, allez-y ensemble" : Nous devons tous voyager ensemble et mettre de côté nos différences pour apporter de meilleures solutions, plus rapidement."

Jayn a été élue en 2023 à la première place du “Who's Who in Natural Beauty”, une liste annuelle qui récompense 25 personnalités qui contribuent à faire avancer l'industrie de la beauté naturelle. C'est la onzième année que Jayn figure dans le Top 25,  et la septième fois qu'elle occupe la première place !